Citation
« Le cerveau s’atrophie lorsque l’animal
est élevé en isolement sensoriel, et se développe au-delà
de la moyenne dans un environnement d’hyperstimulation auditive, visuelle,
affective, tactile… »
Boris Cyrulnik
Documentation web
Nous allons nous intéresser à l'influence de l'environnement physique précoce sur deux domaines particulièrement étudiés - nous aurions pu prendre bien d'autres exemples - :
L'homéostasie sensorielle relève de processus identiques et est étudiée à part, vue son importance dans le développement comportemental.
L'existence de périodes sensibles pour l'acquisition de certaines compétences sensorielles a été particulièrement bien démontrée par David Hunter Hubel et Tortsen Wiesel.
Ces neurobiologistes, américain et suédois, ont travaillé dans les années 60-80 sur la fonction visuelle chez le chat.
Ils obtiendront le prix Nobel de physiologie ou médecine en 1981 pour « leurs découvertes concernant le traitement de l'information dans le système visuel ».
Chez le chat, la vision devient fonctionnelle vers l'âge d'une semaine
(période néonatale)
par l'ouverture des paupières et la maturité du cortex sensoriel
visuel.
Ces scientifiques ont soumis des chatons à des privations sensorielles en les plaçant dans des environnements visuels contrôlés à différentes étapes de leur développement et durant des périodes plus ou moins longues.
A la naissance, le cortex visuel est très immature et la plupart des synapses doivent encore se former.
La non-utilisation de ses synapses provoque des changements dans la structure
et dans le fonctionnement des voies
optiques.
1er temps : Dans l'une de ces expériences, des chatons étaient placés dans un environnement constitué de rayures orientées dans une seule direction (verticale, par exemple) quelques heures par jour, ceci depuis l'âge de 1 semaine jusqu'à l'âge de 6 semaines.
Durant les périodes d'exposition à l'environnement visuel contrôlé, les chatons étaient munis de collerettes les empêchant de voir leur propre corps. En dehors de ces périodes, les animaux étaient maintenus dans l'obscurité, en compagnie de leur mère et du reste de la portée.
2ème temps : à l'issue de la période de privation, ces chatons ont été replacés dans un environnement visuel normal.
Sur le plan comportemental, ces chatons montraient de grandes difficultés
à détecter des objets allongés dans la direction horizontale
ou se déplaçant dans cette direction.
Des enregistrements électrophysiologiques ont été réalisés dans le cortex visuel primaire de ces chatons, et en particulier dans la couche IV.
Un neurone A répondra par exemple de façon
maximale à la présentation d'une barre lumineuse orientée
dans la direction verticale. Il répondra moins à une barre
inclinée de 10° par rapport à la verticale, et ne répondra
plus du tout à une barre inclinée à 15°.
Chez un individu placé dans un environnement normal, des populations de neurones se spécialisent par apprentissage, pendant une période donnée, dans la détection d'une direction particulière : l'animal peut donc toutes les percevoir.
1. Chez les chatons élevés dans un environnement visuel exclusivement constitué de rayures verticales en revanche, les enregistrements électrophysiologiques montrent qu'aucun neurone ou presque n'est activé par la présentation de barres lumineuses orientées dans la direction horizontale.
2.Des résultats comparables ont été retrouvés pour des privations portant sur des directions différentes (horizontales, obliques, ...) entre l'âge de 1 à 6 semaines (S1 à S6).
3. En revanche, des privations plus brèves (entre S2 et S4 ou entre S3 et S5 par exemple) ou plus tardives (après S6) n'entraînent pas de déficit de détection directionnelle.
Pour que l'animal soit capable de détecter l'ensemble des directions,
il faut qu'il ait été exposé à un environnement
visuel complet entre S1 et S6 : c'est une période
sensible pour le développement de la spécificité
directionnelle.
Dans une autre expérience, Hubel et Wiesel ont étudié la mise en place de la binocularité, aptitude à voir avec les deux yeux et donc à voir en relief.
Si l'on soumet des chatons à une privation monoculaire (suture des paupières d'un oeil) durant les 6 premières semaines de vie postanatale, ils perdent de façon définitive l'usage de l'oeil clos une fois la suture enlevée.
Ces expériences ont permis de découvrir les colonnes
de dominance oculaire du cortex
strié (aire visuelle primaire ou V1).
Les enregistrements électrophysiologiques montrent que les cellules du cortex visuel primaire ne répondent pas aux stimulations visuelles présentées à cet oeil.
Il existe donc une période sensible au
cours de laquelle les stimulations en provenance des deux yeux sont indispensables
pour que la binocularité se mette en place.
En effet, des privations monoculaires plus brèves ou effectuées sur des chats plus âgés (plus de 6 semaines) n'aboutissent jamais à la perte fonctionnelle de l'oeil clos, même si les sutures sont maintenues plusieurs mois.
De même que pour la spécificité directionnelle, on constate que le cortex visuel peut potentiellement détecter des informations en provenance des deux yeux entre la naissance et la première semaine.
Les stimulations des vibrisses chez les rongeurs ont un rôle inducteur dans le développement des barillets corticaux, régions de l’aire somesthésique du néocortex du lobe pariétal.
L'étude du développement de ces barillets par Thomas
A. Woolsey a démontré,
comme les expériences de Hubel et Wiesel, l'existence de plasticité cérébrale et
de période sensible pour ce développement.
Ces expériences - et nous aurions pu en prendre bien d'autres - démontrent
la plasticité du développement cérébral en fonction
des stimuli sensoriels, tant au niveau structurel que fonctionnel.
Comment peut-on expliquer ces phénomènes ?
Ces observations trouvent un support théorique intéressant dans la théorie de la stabilisation sélective proposée par Jean-Pierre Changeux au début des années 80.
Développement
comportementalFacteurs
génétiquesFacteurs
épigénétiques
Périodes
de développement comportemental du chien et du chat
Période prénatalePériode néonatalePériode de transition
Période de socialisation Période juvénile
Développement
comportemental du chienDéveloppement
comportemental du chat
Troubles
du développement comportementalPrévention
des troubles