Citation
« Non seulement il est certain que les bêtes
sentent, il l'est encore qu'elles se ressouviennent… L'exercice de
la mémoire les met dans le cas de comparer une sensation passée
avec une sensation présente. Toute comparaison entre deux objets
produit nécessairement un jugement; les bêtes jugent donc.
»
Charles Georges Leroy
Le courant naturaliste, déjà apparu avec Aristote (382-324 av.JC) et issu de l'approche zoologique, se développe au XVIIIe siècle. Le courant naturaliste voit naître les pionniers et les premières classifications de l'Histoire Naturelle.
Ce sont des personnages comme :
Tous ces scientifiques, ainsi que leurs prédécesseurs et leurs
successeurs, sont étudiés sous le point de vue du fixisme
et de l'évolutionnisme dans des pages spéciales (
infos).
Toute l'oeuvre de Georges-Louis
Leclerc, comte de Buffon (1707-1788) peut être consultée
en ligne (
infos). Il est l'auteur d’une Histoire naturelle, générale
et particulière, publiée en 36 volumes entre 1749 et 1788.
L’Histoire naturelle a remporté un immense succès et a été traduite en plusieurs langues. Elle est parue en même temps que l’Encyclopédie ( infos) de Denis Diderot (1713-1784).
Buffon travaille avec minutie et il accumule les observations sur près de cinquante ans. Il détaille chaque espèce pour en faire une description anatomique détaillée - ce qui fera un précurseur de l'anatomie développée par Georges Cuvier (1769-1832) - en décrivant leurs moeurs, certes de manière anthropomorphique.
« L’idée générale que nous nous sommes formée de l’animal, sera, si vous voulez, prise principalement de l’idée particulière du chien, du cheval, et d’autres bêtes qui nous paroissent avoir de l’intelligence, de la volonté, qui semblent se déterminer et se mouvoir suivant cette volonté, et qui de plus sont composées de chair et de sang, qui cherchent et prennent leur nourriture, qui ont des sens, des sèxes et la faculté de se reproduire. » Tome second p : 250
Il mettra en doute la datation de la création de la terre ( infos), ce qui le poussera à être, sans le vouloir, un précurseur du transformisme ( infos).
Buffon étudiera également l'intelligence, l'instinct, la domestication des animaux ( infos) qui sera reprise par Charles Darwin (1809-1882).
«
L’homme change l’état naturel des animaux en les forçant
à lui obéir, et les faisant servir à son usage : un
animal domestique est un esclave dont on s’amuse, dont on se sert,
dont on abuse, qu’on altère, qu’on dépayse et
que l’on dénature, tandis que l’animal sauvage, n’obéissant
qu’à la Nature, ne connoît d’autres loix que celles
du besoin et de la liberté. L’histoire d’un animal sauvage
est donc bornée à un petit nombre de faits émanés
de la simple Nature, au lieu que l’histoire d’un animal domestique
est compliquée de tout ce qui a rapport à l’art que
l’on emploie pour l’apprivoiser ou pour le subjuguer ; et comme
on ne sait pas assez combien l’exemple, la contrainte, la force de
l’habitude peuvent influer sur les animaux et changer leurs mouvemens,
leurs déterminations, leurs penchans, le but d’un Naturaliste
doit être de les observer assez pour pouvoir distinguer les faits
qui dépendent de l’instinct, de ceux qui ne viennent que de
l’éducation ; reconnoître ce qui leur appartient
et ce qu’ils ont emprunté, séparer ce qu’ils font
de ce qu’on leur fait faire, et ne jamais confondre l’animal
avec l’esclave, la bête de somme avec la créature de
Dieu.
L’empire de l’homme sur les animaux est un empire légitime
qu’aucune révolution ne peut détruire, c’est l’empire
de l’esprit sur la matière… c’est par supériorité
de Nature que l’homme règne et commande, il pense, et dès-lors
il est maître des êtres qui ne pensent point…
il a fallu du temps pour les approcher, pour les reconnoître, pour
les choisir, pour les dompter, il a fallu qu’il fût civilisé
lui-même pour savoir instruire et commander, et l’empire sur
les animaux, comme tous les autres empires, n’a été
fondé qu’après la société.
C’est d’elle que l’homme tient sa puissance, c’est
par elle qu’il a perfectionné sa raison, exercé son
esprit et réuni ses forces, auparavant l’homme étoit
peut-être l’animal le plus sauvage et le moins redoutable de
tous ; nud, sans armes et sans abri, la terre n’étoit
pour lui qu’un vaste desert peuplé de monstres, dont souvent
il devenoit la proie ; et même long-temps après, l’histoire
nous dit que les premiers héros n’ont été que
des destructeurs de bêtes.
Mais
lorsqu’avec le temps l’espèce humaine s’est étendue,
multipliée, répandue, et qu’à la faveur des arts
et de la société l’homme a pû marcher en force
pour conquérir l’Univers, il a fait reculer peu à peu
les bêtes féroces, il a purgé la terre de ces animaux
gigantesques dont nous trouvons encore les ossemens énormes, il a
détruit ou réduit à un petit nombre d’individus
les espèces voraces et nuisibles, il a opposé les animaux
aux animaux, et subjuguant les uns par adresse, domptant les autres par
la force, ou les écartant par le nombre, et les attaquant tous par
des moyens raisonnés, il est parvenu à se mettre en sûreté,
et à établir un empire qui n’est borné que par
les lieux inaccessibles, les solitudes reculées, les sables brûlans,
les montagnes glacées, les cavernes obscures, qui servent de retraites
au petit nombre d’espèces d’animaux indomptables. »
Tome IV p : 169-173
Suivent alors des chapitres sur les espèces d'animaux domestiques et, en particulier sur les chiens ( infos) et les chats ( infos).
« On a vu dans l’histoire de chaque animal domestique, combien l’éducation, l’abri, le soin, la main de l’homme influent sur le naturel, sur les moeurs, et même sur la forme des animaux. On a vu que ces causes, jointes à l’influence du climat, modifient, altèrent et changent les espèces au point d’être différentes de ce qu’elles étoient originairement, et rendent les individus si différens entr’eux, dans le même temps et dans la même espèce, qu’on auroit raison de les regarder comme des animaux différens, s’ils ne conservoient pas la faculté de produire ensemble des individus féconds, ce qui fait le caractère essentiel et unique de l’espèce. » Tome VI p : 15-16
Vous pouvez lire les paragraphes instructifs sur la manière dont
on voyait les chiens et les chats à l'époque (
infos).
Ses contributions à l'évolutionnisme sont contenues, entre autres, dans " histoire naturelle, générale et particulière avec la description du cabinet du Roi, Tome Quatorzième ".
Charles Georges Leroy (1723-1789) écrivit un article intitulé " Instinct des animaux " dans l'Encyclopédie méthodique en 1764 ( infos).
Vous pouvez lire la lettre sur l'instinct ( infos). « L'anatomie comparée nous montre dans les bêtes des organes semblables aux nôtres, et disposés pour les mêmes fonctions relatives à l'économie animale. Le détail de leurs actions nous fait clairement apercevoir qu'elles sont douées de la faculté de sentir, c'est-à-dire, qu'elles éprouvent ce que nous éprouvons lorsque nos organes sont remués par l'action des objets extérieurs. Douter si les bêtes ont cette faculté, c'est mettre en doute si nos semblables en sont pourvus, puisque nous n'en sommes assurés que par les mêmes signes. »
« Nous avons reconnu, Monsieur, en parcourant la vie journalière de quelques animaux qu'ils sont doués de la sensibilité et de la mémoire, de la faculté de saisir des rapports et de juger, du pouvoir de réfléchir sur leurs actes, etc., nous ne pouvons pas douter que l'usage de ces facultés ne s'applique à plus ou moins d'objets, en raison des occasions et des besoins. Nous sommes forcés d'avouer qu'on ne peut pas fixer la mesure de l'intelligence des différentes espèces de bêtes, puisqu'elle dépend des circonstances, qu'elle s'étend toujours lorsqu'elle est mise en action par la nécessité, et qu'elle ne se resserre, que par le défaut d'exercice. » Lettre sur la perfectabilité des animaux ( infos)
Leroy est un précurseur de l'éthologie telle qu'on l'entend à l'heure actuelle et qui n'existait pas encore à l'époque. En effet, il observe les animaux dans la nature et compare leurs comportements.
Dans les lettres sur les animaux et
sur l'homme (
infos) & (
infos), Leroy écrit : « Nous
ne saurons jamais de quelle nature est l'âme des bêtes, et il
faut convenir que cela nous importe assez peu. Nous sommes très-assurés
que la nôtre est immatérielle et immortelle : la certitude
que nous en avons, est le fondement de nos chères espéances.
Que l'âme des bêtes soit immatérielle ou non, il est
toujours certain qu'elle ne peut jamais avoir la destination glorieuse qui
est réservée à la nôtre ; ainsi la religion n'est
nullement intéressée dans l'examen qu'on peut faire des facultés
dont les animaux sont doués. Mais de même qu'en observant la
structure intérieure du corps des animaux, nous appercevons des rapports
d'organes qui servent souvent à nous éclairer sur la structure
et l'usage des parties de notre propre corps ; ainsi, en observant les actions
produites par la sensibilité qu'ils ont, ainsi que nous, on peut
acquérir des lumières sur le détail des opérations
de notre âme, relativement aux mêmes sensations.
Je
dis, Monsieur, que les bêtes sentent comme nous ;
et je crois que pour penser autrement, Il faudrait absolument fermer ses
yeux et son coeur… Il me paraît donc impossible de
ne pas admettre le sentiment dans les bêtes. Les plus obstinés
partisans de l'automatisme leur accordent encore tacitement la mémoire
; car ils veulent avoir des chiens sages, et les corrigent. Ces faits étant
admis, le Naturaliste, après avoir bien observé la
structure des parties, soit extérieures, soit intérieures,
des animaux, et devine leur usage, doit quitter le scalpel, abandonner son
cabinet, s'enfoncer dans les bois pour suivre les allures de oes êtres
sentans ; juger des dêveloppemens et des effets de leur faculté
de sentir, et voir comment, par l'action répétée de
la sensation et de l'exercice de la mémoire, leur instinct s'élève
jusqu'à I'intelligence.
Les sensations et la mémoire ont des effets nécessaires, qui
ne doivent pas échapper à l'observateur. Les bêtes font
un grand nombre d'actions qui ne supposent que ces deux facultés ;
mais il en est d'autres qu'on ne pourrait jamais expliquer par ce qui appartient
à ces facultés seules, sans y joindre leur cortège
naturel. Il taut donc que le Naturaliste distingue avec beaucoup de précision,
ce qui est produit par la sensation simple, par la réminiscence,
par la comparaison entre un objet présent et un autre que la mémoire
rappele, par le jugement qui est un résultat de la comparaison, par
le choix qui est une suite du jugement, enfin par la notion de la chose
jugée,qui s'établit dans la mémoire, et que la répétition
des actes rend habituelle et presque machinale. Voilà, Monsieur,
des distinctions qui doivent étre toujours présentes à
l'attention de l'observateur. La forme, tant intérieure qu'extérieure,
la durée de l'accroissement et de la vie, la manière de se
nourrir, les inclinations dominantes, la manière et le tems de l'accouchement,
celui de la gestation, etc., ce ne sont-la proprement que des objets de
première vue, sur lesquels il suffit d'avoir les yeux ouverts ; mais
suivre l'animal dans toutes ses opérations, pénétrer
dans les motifs secrets de ses déterminations, voir comment les sensations,
les besoins, les obstacles, les impressions de toute espèce dont
un être sentant est assailli, multiplient ses mouvemens, modifient
ses actions, étendent ses connaissances, c'est ce qui me paraî
être spécialement du domaine de la philosophie. »
Lettre première p : 3 et suivantes
AristoteRené DescartesCourant
vitalisteCourant
neurophysiologiste
Courant
prépsychologiqueCourant
behavioristeCourant
naturaliste
Ethologie
objectiveInné-Acquis
Ethologie
précognitiveEthologie
cognitive