Histoire de l'éthologie
Courant behavioriste (behaviorisme)

Citation

« la psychologie, ainsi que la voit le behavioriste, est une étude purement objective, expérimentale et ainsi une branche des sciences naturelles, qui a aussi peu besoin de l’introspection que les sciences physiques ou chimiques. »

John Broadus Watson

Sommaire

Avec le behaviorisme se développe un profond radicalisme des garde-fous proposés par Conway Lloyd Morgan (1852-1936).


Ce terme n'est pas choisi au hasard : on remplace le terme de conscience, d'esprit, d'âme… par le terme comportement observable (" behavior " en anglais).

John Broadus Watson (1878-1958) qui établit le manifeste behavioriste en 1913 dans un article " Psychology as the behaviorist views it " écrit : « la psychologie, ainsi que la voit le behavioriste, est une étude purement objective, expérimentale et ainsi une branche des sciences naturelles, qui a aussi peu besoin de l’introspection que les sciences physiques ou chimiques. »

thorndike Le behaviorisme subit une profonde influence du courant physiologique, et notamment des travaux issus de la neurophysiologie russe et allemande ( infos). En outre, les précurseurs sont les associationnistes ( infos).


Le courant behavioriste aura une influence considérable sur la psychologie jusque dans les années 1960.

Naissance du behaviorisme ( infos)

Le behaviorisme naît d'une volonté d'abandonner toute forme de " mentalisme " et d'un souhait de se doter d'une méthodologie scientifique rigoureuse.

Pour cela et avant tout, la priorité est donnée à l'observable (ce qui entre et ce qui sort : input et output) et au rejet de facultés jugées difficilement mesurables et susceptibles d'échapper à toute analyse : la conscience, l'intentionnalité, le raisonnement, la logique, les états mentaux, les représentations mentales.

Les états mentaux ne peuvent être observés scientifiquement : à l'époque, l'IRM n'existait pas. La tête est comme une " boîte noire " qui ne peut rien laisser paraître.

Grâce à une méthodologie rigoureuse, le behaviorisme accède au statut de discipline scientifique.

Au départ, c'est Edward Thorndike (1874-1949) qui reprend les idées de l'école allemande ( infos), mais également d'Alexander Bain (1818-1903) sur le rôle du plaisir et de la douleur dans les phénomènes d'apprentissage.


Le behaviorisme est préoccupé par la recherche de lois générales sur l'apprentissage. C'est Thorndhike qui découvrira la loi de l'effet ( infos) et la loi de l'exercice ou de la répétition ( infos).

watsonPar la suite, John Broadus Watson (1878-1958) a conduit de nombreuses expériences sur le conditionnement dans les réactions émotionnelles : pour lui, les actions réflexes deviennent des comportements intentionnels lors du développement comportemental.

Watson rejette une partie des conclusions de la psychanalyse sur les stades de l'enfant et essaie de montrer que le développement est continu. Il réalisa, pour se faire, des expériences condamnables sur les réactions de peur chez (le " petit Albert ") qui ne pourraient plus avoir lieu à l'heure actuelle pour un problème éthique ( infos).

Il écrit, en 1924, dans Behaviourism : « Donnez-moi une douzaine d’enfants en bonne santé, bien constitués, et laissez-moi libre de les éduquer selon ma propre approche. Je vous garantis que, en les prenant au hasard, je les formerai de manière à en faire un spécialiste de mon choix : médecin, juge, artiste, commerçant, et même mendiant ou voleur, tout ceci, indépendamment de leurs talents, penchants, tendances, aptitudes, ainsi que de la profession et de la race de leurs ancêtres. »


Toute est une question de conditionnement, d'environnement et d'histoire individuelle.

skinnerBurrhus Frédéric Skinner (1904-1990) a conduit de très nombreuses études en laboratoire sur un petit nombre d'espèces (rat surtout). Skinner développe un modèle qui tolère uniquement le conditionnement répondant de Pavlov (c'est-à-dire réflexe) et opérant (c'est-à-dire pensé).


Les behavioristes négligent la dimension phylogénétique, évolutive et adaptative des comportements.


Les behavioristes, comme l'école vétérinaire anglo-saxonne de comportement, ont une autre vision que nous, vétérinaires comportementalistes de l'école latine.

  • Ils n'osent pas ouvrir la " boîte noire" (le cerveau) et considèrent que nous ne pourront jamais avoir une idée des " pensées " des animaux. Ils n'osent pas parler de sentiments, de perceptions, de représentations et hurlent à l'idée de nous entendre parler de phobie, d'anxiété ou de dépression. Ils n'envisagent pas de prescrire des psychotropes pour aider l'animal à surmonter ses difficultés d'adaptation.
  • Par contre, ils nous ont apporté une grande partie des thérapies comportementales ( infos).

Applications aux théories de l'apprentissage

Le behaviorisme vise à étudier les lois d'association entre un stimulus (S) et la réponse (R) de l'animal à l'égard de ce stiulus ( infos). Il sera prédominant pendant un demi-siècle environ.

Ces théories connexionnistes, ou associationnistes considèrent que l'individu reçoit des stimulations et émet des réponses.

  • Elles s'attachent à étudier des éléments concrets et mesurables, c'est-à-dire les " entrées " (input) que constituent les stimuli et les " sorties " (output) qui sont les réponses.
  • Elles formulent des lois ( infos), régissant l'établissement de connexions :
    • soit stimulus - stimulus (S-S),
    • soit stimulus - réponse (S-R).

Rat dans une cage de SkinnerJusqu'aux années 60, le modèle stimulus-réponse (S-R) rappelle l'objet principal de la neurophysiologie de l'époque : le réflexe ( infos).

  • Les expériences menées mettent en jeu des stimuli contrôlables, évoquant de manière constante des comportements dont la reproductibilité permet d'établir un certain nombre de lois.
  • Les behavioristes maîtrisent parfaitement l'environnement expérimental afin de contrôler séparément tous les facteurs susceptibles d'agir sur les comportements.

Pour les connexionnistes, l'apprentissage est la modification du comportement d'un animal résultant de son expérience. Par l'apprentissage, il établit des liaisons nouvelles entre des stimuli ou entre un stimulus et une réponse.

Ces théories ne nient pas nécessairement l'existence de processus internes et abstraits (variables intermédiaires, processus mentaux...).

  • Toutefois, comme il n'est pas possible d'observer ces processus puisque le fonctionnement mental du sujet n'est pas accessible tant au plan neurobiologique que psychologique, le behaviorisme préfère ne pas en tenir compte.
  • Pour Watson, il est vain de prétendre étudier le contenu de cette boîte noire.


Avec ce concept disparaît pour de nombreuses années toute notion d'expérience subjective.


Heureusement, deux courants psychologiques luttent contre l'hégémonie des behavioristes
:

  • le courant dérivé du puissant courant naturaliste ( infos), l'éthologie objective ( infos),
  • le courant précognitiviste ( infos).

AristoteRené DescartesCourant vitalisteCourant neurophysiologiste
Courant prépsychologiqueCourant behavioristeCourant naturaliste
Ethologie objectiveInné-Acquis
Ethologie précognitive
Ethologie cognitive

Bibliographie
  • Gheusi G. - La cognition animale - 3ème cycle professionnel des écoles nationales vétérinaires - Toulouse 2000
  • de Witt Hendrick C.D. - Histoire du développement et de la biologie - Volume, I, II, III - Presses polytechniques et universitaires romandes, Paris, 404, 460 et 635 p., 1992, 1993 et 1994
  • Eibl-Eibesfeldt I. - Ethologie - Biologie du comportement - Naturalia et Biologica Editions scientifiques Paris, 576 p., 1972
  • Bensch - Présentation de l'éthologie et des comportements - 3ème cycle professionnel des écoles nationales vétérinaires - Toulouse 2000
  • Campan R., Scapini F. - Ethologie, approche systémique du comportement - De Boeck Université, Bruxelles, 737 p., 2002
  • Université d'Oxford - Dictionnaire du comportement animal - Robert Laffont, Paris, 1013 p., 1990
  • Immelmann K. - Dictionnaire de l'éthologie - Pierre Mardaga Editeur, Liège, 296 p., 1990