Citation
« L'intelligence dans ce qu'elle a d'inné
est la connaissance d'une forme, l'instinct implique celle d'une matière.
»
Henri Bergson
Le cadre très artificiel des expériences menées par les behavioristes ( infos) représente la principale critique de scientifiques issus du courant naturaliste ou zoologiste ( infos) qui s'intéressaient aux comportements des animaux.
Konrad Lorenz (1903-1989)
et Nikolaas
Tinbergen (1907-1988) peuvent être considérés comme
les véritables fondateurs de la science du comportement comparé,
l'éthologie.
Ces chercheurs sont en droite ligne des naturalistes évolutionnistes successeurs de Charles Darwin (1809-1882) . Lorenz était, selon ses dires, un « darwiniste acharné ».
Quelles sont alors les relations entre instinct et apprentissage ?
1. Johann Ferdinand Adam von Pernau (1660-1730) a travaillé assidûment sur les chants des oiseaux.
Von Pernau a démontré qu'ils sont :
« Les animaux possèdent des facultés innées qui leur permettent d'agir individuellement, avec libre-arbitre, dans le sens du maintien et de l'évolution de leur espèce. D'autres voies ne sont cependant pas à exclure : ainsi ont-ils des " talents " naturels qui s'exercent avec perfection dès la naissance, sans expérience, apprentissage, ou modèle d'aucune sorte. Les " talents " sont donc incontestablement innés et héréditaires et ne doivent rien à l'habitude. Certains ne se manifestent qu'à un âge et dans des circonstances bien définies, ils n'apparaissent parfois qu'une seule fois au cours de la vie, mais ils sont toujours exécutés à la perfection. Les impulsions des animaux ne sont cependant pas déterminées dans le détail, et les individus orientent et varient leur comportement selon les circonstances. Si l'ensemble et le détail des forces naturelles se trouvaient être totalement programmés. nous nous trouverions devant des mécaniques inanimées parfaites, et non pas devant des individus bien vivants. » H.S. Reimarus (1773) cité par Eibl-Eibesfeldt dans l'introduction de " l'éthologie - Biologie du comportement "
2. Douglas Spalding (1840-1877) écrit un article appelé " L'instinct " ( infos).
Spalding montre que des hirondelles savent parfaitement voler même si on les élève dans des cages étroites où elles ne peuvent se mouvoir.
Spalding est à l'origine des expériences d'isolement sensoriel.
3. Jean Henri Fabre (1823-1915), Alfred Giard (1846-1908) et de nombreux entomologues ont étudié l'instinct des insectes.
Louis Verlaine (1889-1939) écrivit 29 mémoires consacrés à l’Instinct et l’Intelligence chez les Hyménoptères ( infos).
Charles Darwin (1809-1882) est considéré comme le précurseur
de la recherche comportementale comparée dans son livre " L'expression
des émotions chez les hommes et animaux " en 1872 (
infos).
4. Oskar Heinroth (1871-1945), sans oublier son épouse, fut l'un des précurseurs de l'éthologie, en décrivant les mouvements spécifiques des oiseaux, appelés actes impulsifs, qui permettent, pour lui, une classification animale adéquate.
Heinroth travaille sur les canards et découvre l'empreinte ou imprégnation, développée par la suite par Lorenz (cf. plus bas).
Son ouvrage fondamental fut " Die Vögel Mitteleuropas “ (Les Oiseaux de l'Europe centrale) publiés en quatre volume entre 1925 à 1933. Cette ouvrage fit grand bruit et engagea l'observation en milieu naturel de nombreux comportements animaux qualifiés d'innés.
Lorenz lui écrit : « Vous rendez-vous compte que vous êtes véritablement le fondateur d'une science, en l'occurrence de la psychologie animale comme branche de la biologie ? … Votre livre a fait naître en moi de nombreux projets pour l'avenir. »
Otis Whitman (1842-1910), aux Etats-Unis, travailla sur les pigeons
5. Wallace Craig (1876-1954), en 1918, dans un article appelé " Appétence et aversion comme constituant des instincts " ( infos), fut le premier à décrire ce que nous nommons, nous, vétérinaires comportementalistes :
6. Jacob Johann von Uexküll (1864-1944) introduisit la notion d" Umwelt " : les animaux appréhendent l'univers au travers de leurs organes des sens.
En réaction au Behaviorisme se développe alors l'éthologie animée par des naturalistes comme Konrad Lorenz (1903-1989) et Nikolaas Tinbergen (1907-1988) qui affirment que l'étude des comportements des animaux doit se faire dans leur milieu de vie naturel.
Konrad Lorenz (1903-1989) veut revenir à ce qu'il appelle une " anatomie du comportement " : il décrit mlnutieusement toute les comportements de l'espèce, ce qu'on appelle l'éthogramme, plutôt que de contraindre les animaux dans des expériences rigoureuses comme le faisaient les behavioristes.
De cette opposition entre l'éthologie et le behaviorisme naît
la querelle de l'inné et de l'acquis, qui n'est pas totalement élucidé
à l'heure actuelle (
infos).
En effet, aux explications des causes du comportement dues toutes à l'apprentissage des béhavioristes, des scientifiques montrent que de nombreux comportements sont présents à la naissance. Ces comportements sont donc innés et n'ont nul besoin d'apprentissage.
Lorenz dans sa thèse (vers 1925) montre que la spéciation peut se baser également sur l'analyse comportementale et a mis au point la technique éthologique.
« Les instincts comme des organes
doivent être étudiés d’un point phylogénétique.
»
Il appliqua les méthodes d'anatomie comparative que
son professeur de médecine Ferdinand Hochsterrer lui avait enseignées
à l'analyse du comportement animal. Les scientifiques doivent «
se livrer à des études comparées de l’instinct
avec les mêmes méthodes empruntées à l’anatomie
comparée ».
Puis, avant la guerre de 39, Lorenz étudia, avec Tinbergen (cf. plus bas), les mouvements de retournement des oeufs de l'oie cendrée qui mirent en lumière de nombreuses notions fondamentales d'éthologie, et en particulier sur l'instinct.
En parlant de nombreux psychologues qui travaillèrent avant lui (Spencer, Morgan, Watson…), il écrivit : « Je dois avouer que tous m’ont causé une profonde déception et désillusion ! Ce n’était pas des experts ! Ils ne connaissaient simplement rien au sujet des animaux ! Ils étaient ignorants des phénomènes et des problèmes, auxquels, moi, alors jeune homme, je m’étais attaqué. »
Lorenz était, selon ses dires, un « darwiniste acharné », ce qui lui fit prendre des positions eugénistes ( infos) pour le moins discutables qui lui valurent de donner des éclaircissements lors de la remise de son prix Nobel ( infos).
« Il faudrait, pour la préservation de la race, être attentif à une élimination des êtres moralement inférieurs encore plus sévère qu'elle ne l'est aujourd'hui. Nous devons et nous avons le droit de nous fier aux meilleurs d'entre nous et de les charger de faire la sélection qui déterminera la prospérité ou l'anéantissement de notre peuple. » écrivit-il en 1940. « Mes arguments de l'époque ont été mal compris et dans un certain sens très mal interprétés. » repris de Thuillier
Nikolaas Tinbergen (1907-1988) travailla beaucoup avec Lorenz (cf. plus haut)
Tinbergen découvrit les " activités de substitution " ( infos) qui lui donna une notion de hiérarchie dans les actes selon un modèle énergétique cher à Lorenz qui sera battu en brèche plus tard.
Karl Von Frisch (1886-1982) travailla sur les insectes et les poissons et découvrit le langage des abeilles ( infos).
Les travaux de Konrad
Lorenz, Nikolaas
Tinbergen, Karl
Von Frisch ne seront pourtant reconnus au sein de la
communauté scientifique que bien plus tard, lorsqu'ils recevront
le prix Nobel de médecine en 1973 « pour leurs découvertes
sur les types de comportement (social et individuel) des animaux »
? Ils ont respectivement 70, 66 et 87 ans.
Tous ces éthologues soutiennent que l'instinct est inné et
héréditaire et l'apprentissage le complète, mais avec
des prédispositions innées à apprendre. Ils se battront
contre les behavioristes qui soutiennent que c'est l'environnement qui détermine
l'apprentissage (
infos).
AristoteRené DescartesCourant
vitalisteCourant
neurophysiologiste
Courant
prépsychologiqueCourant
behavioristeCourant
naturaliste
Ethologie
objectiveInné-Acquis
Ethologie
précognitiveEthologie
cognitive