Embryologie générale
Différenciation cellulaire (2)

Citation

« C'est au regard surtout qu'il faut s'attacher pour bien spécifier l'état ou le rang des personnes. »

George Sand

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La différenciation cellulaire est un concept de biologie du développement décrivant le processus par lequel les cellules se spécialisent en un " type " cellulaire précis.

Bien que son matériel génétique reste inchangé, la morphologie d'une cellule peut changer radicalement durant cette différenciation.

Les cellules peuvent passer par plusieurs stades :

Cellule spécifiée

Une cellule est spécifiée si elle est capable de se différencier conformément à sa destinée initiale, quand elle se trouve dans une boîte de culture, c'est à dire, dans un environnement neutre (qui ne peut changer l'orientation du développement).


Cette cellule spécifiée, placée dans un environnement différent, change sa destinée (cellule multipotente) et est engagée de façon réversible dans une voie de différentiation.


Spécification autonome

La spécification est autonome chez la majorité des invertébrés, c'est-à-dire sans interactions cellulaires, ce qui provoque un développement en mosaïque.

Par exemple, lors de la fécondation chez les amphibiens, l'oeuf ou les premiers blastomères contiennent des molécules cytoplasmiques différentes qu'on appelle des déterminants morphogénétiques (protéines ou ARN messagers).

  • Les cellules évoluent vers leur destinée invariablement : si on enlève un blastomère, tous les tissus qui en dérivent seront manquants à l'organisme restant.
  • Par contre, isolé, ce blastomère produira les cellules qu'il aurait produit dans l'embryon complet : c'est pourquoi, par métaphore, on parle d'un développement en mosaïque.

Spécification par induction (conditionnée ou conditionnelle)

Centre de Spemann et centre ventral
Centre de Spemann et centre ventral
(Figure : © vetopsy.fr)

La spécification est par induction (conditionnée ou conditionnelle) chez les Vertébrés (et quelques invertébrés), c'est-à-dire avec des interactions cellulaires, conditionnées par leur position relative dans l'organisme : ce développement est dit à régulation.


L'induction est le processus par lequel une cellule (groupe de cellules ou tissu) envoie un signal à une autre cellule (groupe de cellules ou tissu) adjacente qui l’engage vers une nouvelle voie de différenciation.

  • Les cellules qui envoient le signal sont dites inductrices (ou possèdent un pouvoir inducteur).
  • Les cellules qui répondent au signal inducteur pour changer de destinée sont dites compétentes (ou induites).

Si on enlève un blastomère, l'organisme reste inchangé par la substitution de la partie manquante par d'autres cellules multipotentes. Le blastomère isolé produira divers tissus, et même plus diversifiés que ceux qu'il aurait engendré s'il était resté dans l'embryon complet.

Le contact entre cellules inductrices et compétentes peut s'effectuer :

  • Régulations de  FoxI1e
    Régulations de FoxI1e
    (Figure : © vetopsy.fr d'après Mir sous Open Archive)
    par contact direct,
  • par mouvements morphogénétiques comme lors de la formation du mésoderme lors de la gastrulation : certaines cellules peuvent être compétentes, mais aussi inductrices pour d'autres.

Le signal est, le plus souvent, une molécule soluble qui agit à distance (The interpretation of morphogen gradients 2006).

  • Ce sont des morphogènes dont la concentration varie autour de son site de sécétion.
  • Ils agissent selon un degré de concentration.


Ce sont des gradients morphogénétiques (tout savoir sur les morphogènes).

Par exemple, lors de la gastrulation des amphibiens, la lèvre dorsale du blastopore (futur anus des deutérostomiens) est le centre organisateur (cellules inductrices) qui construira l'embryon par diffusion de morphogènes vers l'ectoderme dorsal et l'endoderme ventral (cellules compétentes).

Dans le cas de la spécification, on parle d'interaction instructive.

  • Le signal (signal inducteur ou inducteur tout court) de la cellule inductrice agit sur son récepteur membranaire exprimé par la cellule compétente.
  • Ce complexe molécule-récepteur active une voie de signalisation intracellulaire (transduction du signal) vers le noyau : elle régule la transcription de gènes spécifiques pour engager la cellule-cible dans la différenciation.

Le deuxième type d'interaction est l'interaction permissive, sur une cellule déjà différenciée.

Spécifications syncitiale et conditionnée chez la Drosophile
Spécifications syncitiale et conditionnée
chez la Drosophile
(Figure : © vetopsy.fr))

On peut prendre quelques exemples :

La cellule induite doit être compétente, c'est-à-dire en mesure de répondre au signal de la cellule inductrice. Cette compétence, limitée dans le temps - ce qui est primordial -, est régulée par trois processus :

  • présence ou absence des récepteurs,
  • activation ou inactivation de la transduction du signal,
  • activation ou non de la transcription.

Spécification syncitiale

La spécification est syncytiale chez la mojorité des insectes.

  • Ici, les interactions ne se font pas entre les cellules, mais entre les parties d'une même cellule.
  • Les divisions cellulaires ne concernent que les noyaux qui restent dans un cytoplasme commun : c'est un syncitium. Toutefois, le cytoplasme est très hétérogène.

Chez la drosophile, la partie apicale contient un ARN messager codant pour la protéine Bicoid, et la partie postérieure pour la protéine Nanos qui diffusent chacune vers l'autre pôle. Les organes se différencieront selon un axe antéro-postérieur, renseigné qu'ils sont sur leur position par rapport à ses deux gradients opposés.


L'exemple de la drosophile nous montre que des spécifications conjointes peuvent exister chez un même individu (ici, syncytiale et par induction).

Cellule pyramidale du cortex cérébral
Cellule pyramidale du
cortex cérébral de la souris
(Figure : vetopsy.fr d'après Nrets)

Cellule déterminée

Une cellule est déterminée (engagée, prédestinée) si elle est capable de se différencier de manière autonome, même en étant implantée dans une autre région de l'embryon.

Cette cellule peut quand même faire l'objet d'une induction dit permissive. Contrairement à l'induction instructive, ce processus amplifie la différenciation dèjà engagée et s'applique aux gènes de différenciation.


Une cellule déterminée est engagée dans une voie de différenciation et ne peut changer de destinée (cellule unipotente).


Cellule différenciée

La cellule différenciée est une cellule qui a acquis une fonction et une morphologie spécialisée définitive.

En règle générale, une cellule différenciée :

  • possède une faible capacité de prolifération (sortie du cycle mitotique),
  • exprime un répertoire caractéristique de gènes.

EmbryologieEmbryogenèseZygote (oeuf fécondé)
SegmentationGastrulationOrganogenèseDifférenciation cellulaire

Bibliographie
  • Gilbert S.F. - Biologie du développement - DeBoeck Université, Bruxelles, 836 p., 2004
  • Le Moigne A., Foucrier J. - Biologie du développement - Dunot, Paris, 414 p., 2009
  • Wolpert L. and coll - Biologie du développement - Dunot, Paris, 479 p., 2004
  • Houillon Ch. - Embryologie - Hermann, Paris, 184 p., 1979
  • Marieb E. N. - Anatomie et physiologie humaines - De Boeck Université, Saint-Laurent, 1054 p., 1993
  • Rosenzweig M.R., Leiman A.L., Breedlove S.M. - Psychobiologie  - DeBoeck Université, Bruxelles, 849 p., 1998