Transformisme et évolutionnisme
Voyage de Charles Darwin sur le Beagle (27 décembre 1831- 2 octobre 1836)

Citation

« Les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s'adaptent le mieux aux changements. »

Charles Darwin

Documentation web

Sommaire
  1. Connaissances au XIXe siècle
    1. Echelle des êtres
    2. Age du monde et création biblique
    3. Notion d'espèce
    4. Plans d'organisation et homologie
    5. Génération spontanée
    6. Reproduction et développement
  2. Transformisme et évolutionnisme
    1. Question de sémantique
    2. Antiquité
    3. Moyen Age musulman
    4. Avant Darwin
      1. Georges-Louis Leclerc, comte de Buffon (1707-1788)
      2. Erasmus Darwin (1773-1802)
      3. Etienne Geoffroy Saint-Hilaire (1772-1844)
      4. Jean-Baptiste de Lamarck (1744-1829)
        1. Lamarck naturaliste
        2. Concept de transformisme
        3. Causes de la transformation des espèces selon Lamarck
    5. Charles Darwin (1809-1882)
      1. Charles Darwin à Shrewsbury (1809-1825)
      2. Charles Darwin à Edimbourg (1825-1828)
      3. Charles Darwin à Cambridge (1828-1831)
      4. Voyage de Darwin sur le Beagle (27 décembre 1831- 2 octobre 1836)
        1. Travaux à bord du Beagle : géologie
        2. Travaux à bord du Beagle : zoologie
        3. Travaux à bord du Beagle : écriture du journal
      5. Charles Darwin avant la parution de l'Origine des Espèces (1836-1859)
        1. Vie de Charles Darwin entre 1836 et 1859
        2. Genèse de l'Origine des Espèces
        3. Rédaction de l'Origine des Espèces
        4. Darwin et Wallace
        5. Présentation de l'Origine des Espèces devant la société linéenne (1858)
        6. Succès et polémiques autour de l'Origine des Espèces
      6. Charles Darwin après la parution de l'Origine des Espèces (1859-1882)
        1. Ouvrages de Darwin après l'Origine des Espèces
        2. Réflexions de Darwin sur lui-même
        3. Conclusion de la vie de Darwin d'Henry de Varigny
      7. Théorie de l'évolution
        1. Textes de la théorie de l'évolution
        2. Idées fortes à retenir
      8. Questions de races
        1. Darwin et la question raciale
        2. L'eugénisme et le darwinisme social
        3. Vision actuelle
      9. Darwin et la religion
    6. L'évolutionnisme après Darwin
      1. Développement de la génétique
      2. Théorie synthétique de l'évolution ou néodarwinisme
      3. Théorie neutraliste et quasi-neutraliste
      4. Théorie des équilibres ponctués
  3. Classification phylogénétique et systématique génétique
    1. Cladistique
    2. Phénétique et phylogénie moléculaire
    3. Gènes de développement et systématique génétique
  4. Fixisme et créationnisme
    1. Théorie du fixisme
    2. Résumé des idées fixistes
    3. Fixisme avant Darwin
      1. Carl von Linné (1707-1778)
      2. Georges Cuvier (1769-1832)
      3. Autres savants
    4. Darwin et Agassiz
      1. Darwin et ses " petits " mensonges
      2. Louis Agassiz (1807-1873) : adversaire obstiné de Darwin
    5. Darwin et les Chrétiens
      1. Chrétiens proches de Darwin
      2. Le fixisme aujourd'hui

Bibliographie


Le voyage sur le Beagle (limier en français) est raconté dans un film du CNRS ( infos) et dans Wikipedia (Wiki), et en plus détaillé, sur un site en anglais ( infos).

Les voyages sur le beagle sont racontés dans trois volumes " Narrative of the surveying voyages of His Majesty's Ships Adventure and Beagle between the years 1826 and 1836, describing their examination of the southern shores of South America, and the Beagle's circumnavigation of the globe " : Proceedings of the first expedition, 1826-30 ( infos), Proceedings of the second expedition, 1831-36 ( infos) et un appendice au deuxième volume ( infos).

Travaux à bord du Beagle : géologie

Travaux à bord du Beagle : zoologie ( infos)

Pendant son voyage, Darwin rassembla des animaux de toutes sortes et disséqua de nombreux animaux marins dont des Crustacés qui lui « seront d'un grand secours quand les années suivantes, j'entrepris la monographie des Cirripèdes. » ( infos). Toutefois, comme il ne savait pas bien dessiner et que ses connaissances anatomiques étaient limitées, la collecte « s'est avérée pratiquement inutile. »

Quoi qu'il en dise, Il fit des découvertes primordiales qui l'orientèrent vers sa théorie de l'évolution des espèces dont nous ne citerons que les principales.

Animaux géants des pampas

Dans les plaines de la pampa, il découvrit, dans des couches contenant des coquillages récents, neuf fossiles d'animaux géants proches des animaux vivant actuellement sur place. Les recherches complémentaires furent effectuées par Richard Owen (1804-1892).

Squelette de Toxodon« A Punta Alta, on trouve une section de l'une de ces petites plaines récemment formées, fort intéressante par le nombre et le caractère extraordinaire des restes d'animaux terrestres gigantesques qui y sont enfouis. Ces restes ont été longuement décrits par le professeur Owen dans la Zoologie du voyage du Beagle… : Megatherium…, Megalonyx…, Scelidotherium…, Mylodon…, un animal portant une carapace osseuse à compartiments, ressemblant beaucoup à celle du tatou… enfin le Toxodon, un des animaux les plus étranges peut-être qu'on ait pu jamais découverts. Par sa taille, cet animal ressemblait à l'éléphant ou au mégathérium ; mais la structure de ses dents, ainsi que l'affirme M. Owen, prouve incontestablement qu'il était allié de fort près aux rongeurs, ordre qui comprend aujourd'hui les plus petits quadrupèdes ; par bien des points, il se rapproche aussi des pachydermes ; enfin, à en juger par la position de ses yeux, de ses oreilles et de ses narines, il avait probablement des habitudes aquatiques, comme le Dugong et le Lamantin, dont il se rapproche aussi. Combien il est étonnant de trouver ces différents ordres, aujourd'hui si bien séparés, confondus dans les différentes parties de l'organisation du Toxodon !
ScelidotheriumLes restes fossiles de Punta Alta se trouvaient enfouis dans du gravier stratifié et de la boue rougeâtre ressemblant exactement aux dépôts que la mer pourrait former actuellement sur une côte peu profonde. Auprès de ces fossiles, j'ai retrouvé vingt-trois espèces de coquillages, dont treize récents et quatre très proches voisins des formes récentes… On ne peut guère douter, je crois, que ce dépôt n'appartienne à une période tertiaire fort récente. Les ossements du Scélidothérium, y compris même la rotule du genou, étaient enfouis dans leurs positions relatives ; la carapace osseuse du grand animal ressemblant au Tatou était dans un parfait état de conservation, ainsi que les os de l'une de ses jambes ; nous pouvons donc affirmer, sans craindre de nous tromper, que ces restes étaient récents et encore unis par leurs ligaments quand ils ont été déposés dans le gravier avec les coquillages. Ces faits nous fournissent la preuve que les quadrupèdes gigantesques ci-dessus énumérés, plus différents de ceux de Megatheriuml'époque actuelle que ne le sont les plus anciens quadrupèdes tertiaires de l'Europe, existaient à une époque où la mer contenait la plupart de ses habitants actuels. Nous trouvons là aussi une confirmation de la loi remarquable sur laquelle M. Lyell a insisté si souvent, c'est-à-dire que " la longévité des espèces de mammifères est en somme inférieure à celle des espèces de mollusques ". La grandeur des ossements des animaux mégathéroides, y compris le Mégathérium, le Mégalonyx, le Scélidothérium et le Mylodon, est réellement extraordinaire.
Comment vivaient ces animaux ? Véritables problèmes pour les naturalistes jusqu'à ce que le professeur Owen les eût dernièrement résolus avec une grande ingéniosité. Les dents indiquent, par leur simple conformation, que ces animaux mégathéroïdes se nourrissaient de végétaux et mangeaient probablement les feuilles et les petites branches des arbres… Le professeur Owen soutient, ce qui est bien plus probable, qu'au lieu de grimper sur les arbres, ces animaux attiraient à eux les branches et déracinaient les arbrisseaux pour se nourrir de leurs feuilles. »
Voyage d'un naturaliste p: 90-99

Plus tard en Patagonie, il fit les mêmes remarques en découvrant un Macrauchenia dans des couches de coquillages récents.

Macrauchenia« La parenté, bien qu'éloignée, qui existe entre le Macrauchenia et le Guanaco, entre le Toxodon et le Capybara - la parenté plus rapprochée qui existe entre les nombreux Edentés éteints et les Paresseux, les Fourmiliers et les Tatous actuels qui caractérisent si nettement la zoologie de l'Amérique méridionale - la parenté encore plus rapprochée qui existe entre les espèces fossiles et les espèces vivantes de Ctenomys et d'Hydrochoerus, constituent des faits fort intéressants. La grande collection, provenant des cavernes du Brésil, qu'ont dernièrement rapportée en Europe MM. Lund et Clausen, prouve admirablement cette parenté aussi remarquable que celle qui existe entre les Marsupiaux fossiles et les Marsupiaux vivants de l'Australie. Les trente-deux genres, sauf quatre, de quadrupèdes terrestres, qui habitent aujourd'hui le pays où se trouvent les cavernes, sont représentés par des espèces éteintes dans la collection dont je viens de parler. Les espèces éteintes sont d'ailleurs beaucoup plus nombreuses que les espèces actuelles ; on remarque de nombreux spécimens fossiles de fourmiliers, de tapirs, de pécaris, de guanacos, d'opossums, de rongeurs, de singes et d'autres animaux. Cette parenté étonnante, sur le même continent, entre les morts et les vivants jettera bientôt, je n'en doute pas, beaucoup plus de lumière que toute autre classe de faits sur le problème de l'apparition et de la disparition des êtres organisés à la surface de la terre.  » Voyage d'un naturaliste p: 189-190 ; voir également ( infos)

Iles des Galapagos

Enfin, dans l'archipel des Galapagos, il décrit les différences existant entre les pinsons ou entre les tortues des différentes îles.

Pinsons des Galapagos« Le fait le plus curieux est la parfaite gradation de la grosseur des becs chez les différentes espèces de Geospiza ; cette grosseur varie depuis celle du bec d'un gros-bec jusqu'à celle du bec d'un pinson… ; La figure 1 représente le plus gros bec du genre Geospiza ; la figure 3, le plus petit ; mais au lieu d'y avoir une seule grosseur intermédiaire, comme dans la figure 2, on trouve six espèces dont les becs vont graduellement en diminuant… Quand on considère cette gradation et cette diversité de conformation dans un petit groupe d'oiseaux très voisins les uns des autres, on pourrait réellement se figurer qu'en vertu d'une pauvreté originelle d'oiseaux dans cet archipel, une seule espèce s'est modifiée pour atteindre des buts différents. » Voyage d'un naturaliste p: 166

« Je n'ai pas encore parlé du caractère de beaucoup le plus remarquable de l'histoire naturelle de cet archipel, c'est-à-dire que les différentes îles sont, dans une grande mesure, habitées par des animaux ayant un caractère différent. C'est le vice-gouverneur, M. Lawson, qui a appelé mon attention sur ce fait ; il m'a affirmé que les tortues différaient sur les différentes îles et qu'il pouvait dire avec certitude de quelle île provenait telle tortue qu'on lui apportait ( infos). Malheureusement je négligeai trop cette affirmation dans le principe et je mélangeai les collections provenant de deux des îles. Mais ce qui éveilla complètement mon attention, ce fut la comparaison des nombreux spécimens d'oiseaux moqueurs tués par moi ou par les officiers du bord. A mon grand étonnement, je m'aperçus que tous ceux qui provenaient de l'île Charles appartenaient Tortue géante des Galapagosà l'espèce Mimus trifasciatus ; tous ceux qui provenaient de l'île Albemarle appartenaient à l'espèce Mimus parvulus ; tous ceux qui provenaient des îles James et Chatham, entre lesquelles sont situées deux autres îles formant une espèce de lien, appartenaient à l'espèce Mimus melanotis. Ces deux dernières espèces sont très voisines et quelques ornithologistes ne les considéreraient que comme des races ou des variétés bien déterminées. Mais l'espèce Mimus trifasciatus est absolument distincte. Malheureusement, la plupart des spécimens de moineaux se sont trouvés mêlés ensemble, mais j'ai de fortes raisons pour croire que quelques espèces du sous-groupe Geospiza ne se trouvent que sur certaines îles…
Mais ce qui me frappe, c'est au contraire ce fait que plusieurs îles possèdent leurs espèces particulières de tortues, d'oiseaux moqueurs, de moineaux et de plantes, et que ces espèces ont les mêmes habitudes, occupent des situations analogues et remplissent évidemment les mêmes fonctions dans l'économie naturelle de cet archipel. Il se peut sans doute que quelques-unes de ces espèces représentatives, tout au moins en ce qui concerne les tortues et quelques oiseaux, ne soient après tout que des races bien définies ; mais, en admettant qu'il en soit ainsi, ce fait n'en aurait pas moins d'intérêt pour le naturaliste…
Mimus trifasciatus Si l'on se rappelle les faits que je viens d'indiquer on reste étonné de l'énergie de la force créatrice, si on peut employer une telle expression, qui s'est manifestée sur ces petites îles stériles et rocailleuses ; on est encore plus étonné de l'action différente, tout en étant cependant analogue, de cette force créatrice sur des points si rapprochés les uns des autres
. »

Travaux à bord du Beagle : écriture du journal

« Pendant une partie de la journée, j'écrivais mon journal et me suis donné beaucoup de mal pour décrire soigneusement et d'une manière saisissante tout ce que j'avais vu : et ce fut un bon exercice. »

Darwin concentrait son attention sur tout ce qu'il voyait et qu'il lisait. « Cette habitude d'esprit s'est poursuivie au cours des cinq années du voyage. Je suis sûr que c'est cette formation qui m'a permis de faire ce que j'ai fait dans la science. »

Il écrit : « Rétrospectivement, je peux maintenant percevoir combien mon amour pour la science l'emporta progressivement sur tous les autres goûts. Durant les deux premières années, mon ancienne passion pour la chasse est restée intacte avec presque toute sa force, et j'ai tiré moi-même tous les oiseaux et les animaux de ma collection ; mais peu à peu, j'ai abandonné mon arme de plus en plus souvent, et finalement entièrement, à mon serviteur, car la chasse interférait avec mon travail, plus particulièrement dans l'établissement de la structure géologique d'un pays. J'ai découvert, bien qu'inconsciemment et insensiblement, que le plaisir de l'observation et le raisonnement était bien supérieur à celui de l'habileté et du sport. Le fait que mon esprit se soit développé par mes activités pendant le voyage est vraisemblable à cause d'une remarque faite mon père, qui était le plus fin observateur que je n'ai jamais vu, d'un tempérament sceptique, et loin de croire en la phrénologie ; En me voyant pour la première fois après le voyage, il se retourna vers mes soeurs, et s'écria : " Pourquoi, la forme de sa tête a tout à fait changé. " »

Charles Darwin avant la parution de l'Origine des Espèces

Connaissances au XIXeEvolutionnisme avant DarwinJeunesse de Darwin
Voyage du BeagleGéologie à bord du BeagleZoologie à bord du Beagle
Darwin avant l'Origine des EspècesL'Origine des Espèces
Darwin après l'Origine des EspècesThéorie de l'évolutionDarwin et la question raciale
Développement de la génétique
NéodarwinismeClassification phylogénétique
Systématique génétiqueFixismeFixisme avant Darwin
Darwin et AgassizDarwin et les Chrétiens

Bibliographie
  • de Witt Hendrick C.D. - Histoire du développement et de la biologie - Volume, I, II, III - Presses polytechniques et universitaires romandes, Paris, 404, 460 et 635 p., 1992, 1993 et 1994
  • Darwin on line
  • Darwin Ch. - Voyage d'un naturaliste autour du monde - Maspero, Paris, 2 volumes, 251 et 299 p., 1982
  • Rostand J. - Charles Darwin - Gallimard, Paris, 237 p., 1947
  • Conry Y. - Darwin, théorie de l'évolution (textes choisis) - PUF, Paris, 233 p., 1981
  • Thuillier P. - Darwin & C° - Editions Complexe, Bruxelles, 210 p., 1981
  • Eibl-Eibesfeldt I. - Ethologie - Biologie du comportement - Naturalia et Biologica Editions scientifiques Paris, 576 p., 1972
  • Campan R., Scapini F. - Ethologie, approche systémique du comportement - De Boeck Université, Bruxelles, 737 p., 2002
  • Université d'Oxford - Dictionnaire du comportement animal - Robert Laffont, Paris, 1013 p., 1990
  • Immelmann K. - Dictionnaire de l'éthologie - Pierre Mardaga Editeur, Liège, 296 p., 1990