Histoire de l'éthologie
Courant vitaliste

Citation

« Il se pourrait donc bien que l'être vivant, loin d'échapper aux lois physiques, mette en jeu d'autres lois de la physique, encore inconnues, mais qui, une fois révélées, feront tout autant partie intégrante de cette science. »

Erwin Schrödinger

Sommaire

Après René Descartes (1596-1650) la psychologie se scinde en deux courants :

  • le courant vitaliste,
  • le courant mécaniste ( infos) est une conception matérialiste qui essaie d'expliquer tout par les lois physico-chimiques suivant le modèle des liens de cause à effet.

Le courant vitaliste, base de nombreuses religions, comprend en général d'excellents observateurs du monde animal. Même si on ne peut lui donner ce qualificatif, c'est Aristote (384-322 av. JC) qui cherche à définir l'âme ( infos).


Le vitalisme est une tradition philosophique qui définie l'être vivant comme une matière animée d'un principe ou force vitale, qui ne suivrait pas les lois de la matière : c'est cette force occulte qui insufflerait la vie à la matière.

Dans les sciences de la vie en général ( infos)

Paul-Joseph Barthez (1734-1806) est considéré comme le " redécouvreur " du vitalisme. Il s'oppose à Descartes qui a simplifié l'être vivant à un automate régi par l'ensemble des lois physiques. Le vitalisme fut repris par Marie François Xavier Bichat (1771-1801).

Paul-Joseph BarthezPaul-joseph Barthez écrit en 1778 dans " Nouveaux éléments de la science de l'homme " ( infos) « J'appelle principe vital de l'homme la cause qui produit tous les phénomènes de la vie dans le corps humain. Le nom de cette cause est assez indifférent et peut être pris à volonté. Si je préfère celui de principe vital, c'est qu'il présente une idée moins limitée que le nom d'impetum faciens, que lui donnait Hippocrate, ou autres noms par lesquels on a désigné la cause des fonctions de la vie. »

« La vie, au moins morphogénétique, n'est pas un arrangement spécialisé d'événements inorganiques ; la biologie n'est donc pas une physique ou une chimie appliquées : la vie est quelque chose à part, et la biologie est une science indépendante. ... il y a quelque chose à l'oeuvre dans la vie qui porte en soi sa propre fin » Hans Driesch (1867-1941).

En ce début du XIXe siècle, tous ceux, philosophes et biologistes, qui se passionnent pour le phénomène de génération défendent :

  • soit la préformation ( infos) : l'embryon contient tous les organes, mais en miniature, dans l'oeuf (oviste ou ovuliste) ou le spermatozoïde (animalculiste ou spermatiste). L'emboîtement des germes (présence dans l'oeuf de germes innombrables préformés lors de la Création divine) permet l'invariabilité des espèces ( infos).
  • soit l'épigenèse ( infos) : à chaque génération, l'embryon se forme progressivement au cours de la croissance embryonnaire sous l'influence de forces extérieures. Ces scientifiques sont matérialistes.

Georges CanguilhemLa synthèse de l'urée (molécule organique) par Friedrich Wôhler (1800-1882) en 1828, la négation de la génération spontanée par Louis Pasteur (1822-1895) en 1861 ( infos), la découverte des chromosomes, la redécouverte des lois de Mendel au début du XXe siècle ( infos) et la découverte de l'ADN et sa " machinerie " complexe en 1953 avec ses réplications et ses mutations a ébranlé les bases du vitalisme.

Pasteur qui, au départ était vitaliste, écrit en 1864 : « Quelle victoire cela serait pour le matérialisme s'il pouvait démontrer que la matière pouvait s'auto-organiser et fabriquer la vie toute seule ! »

Le vitalisme a pourtant encore des partisans aujourd'hui comme des philosophes contemporains tels que Georges Canguilhem (1904-1995), Gilles Deleuze (1925-1995) ou Hans Jonas (1903-1993).

« Si étrange que cette affirmation puisse d'abord paraître, les vitalistes du XVIIIe siècle ne sont pas, comme les vues trop sommaires de beaucoup d'historiens de la biologie ou de la médecine ont tendu à l'accréditer, d'impénitents métaphysiciens, mais plutôt de prudents positivistes, ce qui revient à dire, pour l'époque, des newtoniens. Le vitalisme, c'est d'abord le refus simultané de toutes les théories métaphysiques concernant l'essence de la vie. [...] Le vitalisme, ce serait simplement la reconnaissance de la vie comme ordre original de phénomènes et donc de la spécificité de la connaissance biologique. » Canguilhem

Dans l'éthologie en particulier

Les vitalistes ne recherchent pas une explication causale du comportement, mais déclarent qu'un comportement ne peut être analysé d'une façon mécaniste. En effet, Descartes parlait d'inertie de la matière qui est un concept à l'opposé du vivant.

  • ils affirment que les comportements sont motivés par des pulsions, des instincts d'origine interne.
  • Ils aboutissent, pour expliquer une finalité causale, à la mise en oeuvre de facteurs entéléchiques " totalisants " et d'instincts, inexplicables et infaillibles. L'entéléchie chez Aristote, est toute réalité parvenue à son état d'achèvement.

« Nous constatons l'existence de l'instinct, mais nous ne l'expliquons pas » J.A. Bierens de Haan (1940).

PrigogineL'école américaine de la " Purposive Psychology " (" psychologie intentionnelle ou téléologique "), dont faisait partie Edward Tolman (1886-1959), a des théories vitalistes très affirmées ( infos).

  • Les chercheurs de ce groupe soulignent le fait que tout comportement a un but, qu'il est donc dirigé vers une finalité voulue.
  • D'après eux, ce but motive l'activité : l'animal serait guidé par des intentions, qui ne nécessitent aucune explication ultérieure.


Nous pouvons essayer, à notre humble niveau, d'aller au-delà des positions des uns et des autres.

L'individu doit s'adapter sans cesse à un environnement en perpétuel changement pour essayer de maintenir un équilibre instable.

Comme pourrait le dire Ilya Prigogine (1917-2003), la vie est loin de l'équilibre chimique ou thermodynamique, c'est-à-dire des lois physico-chimiques de la matière ( infos). Le déséquilibre est créateur de vie : la mort d'un être vivant est en effet synonyme d'équilibre avec son environnement, c'est-à-dire que son milieu interne se confond avec le milieu extérieur.

AristoteRené DescartesCourant vitalisteCourant neurophysiologiste
Courant prépsychologiqueCourant behavioriste Courant naturaliste
Ethologie objectiveInné-Acquis
Ethologie précognitive
Ethologie cognitive

Bibliographie
  • Gheusi G. - La cognition animale - 3ème cycle professionnel des écoles nationales vétérinaires - Toulouse 2000
  • de Witt Hendrick C.D. - Histoire du développement et de la biologie - Volume, I, II, III - Presses polytechniques et universitaires romandes, Paris, 404, 460 et 635 p., 1992, 1993 et 1994
  • Eibl-Eibesfeldt I. - Ethologie - Biologie du comportement - Naturalia et Biologica Editions scientifiques Paris, 576 p., 1972
  • Bensch - Présentation de l'éthologie et des comportements - 3ème cycle professionnel des écoles nationales vétérinaires - Toulouse 2000
  • Campan R., Scapini F. - Ethologie, approche systémique du comportement - De Boeck Université, Bruxelles, 737 p., 2002
  • Université d'Oxford - Dictionnaire du comportement animal - Robert Laffont, Paris, 1013 p., 1990
  • Immelmann K. - Dictionnaire de l'éthologie - Pierre Mardaga Editeur, Liège, 296 p., 1990